En décembre 1922, à l’issue d’un entretien que vous m’aviez fixé, en présence de M. J. Delabrousse, chef du 3ème bureau de la Direction de l’Enseignement supérieur au ministère de l’Instruction publique, je refusai les propositions qui m’étaient faites et je ne signai pas, cette fois, le document préparé à cet effet.
J’ai conservé les notes prises ce jour-là :
« M. Kevorkian déclare que ce qu’il demande, c’est un « emploi tranquille », pour « un temps raisonnable ». Il estime que, quand il a été nommé, l’Administrateur lui a « promis par son silence » que sa nomination à l’emploi de répétiteur pourrait être renouvelée indéfiniment : « C’est Monsieur Boyer qui nomme, dit-il, et il pouvait me nommer pour toujours. » M. Kevorkian estime qu’il a droit à cet emploi « non pas indéfiniment, mais pour un temps raisonnable », c’est-à-dire de façon qu’il ait le temps de prendre ses mesures pour s’en aller.
Quand Monsieur Boyer l’a prévenu qu’il n’était nommé que pour six mois, c’est-à-dire au début de janvier 1922 -lors de la visite que M. Kevorkian a faite à l’Administrateur à l’occasion du Nouvel an, Monsieur Boyer lui a dit qu’il lui fournirait les moyens de continuer ses études. M. Kevorkian allègue qu’il a toujours figuré sur l’affiche, comme ses collègues et sans mention spéciale. Il estime que son traitement pour l’année 1921-1922 lui est dû intégralement.
M. le directeur de l’Enseignement Supérieur a confirmé cette manière de voir -et a ajouté d’autre part que sa nomination pour l’année 1921-1922 avait été irrégulière.
À quatre ou cinq reprises, l’Administrateur pose à M. Kevorkian la question suivante : « Oui ou non, vous rappelez-vous que depuis trois ans je vous ai dit plusieurs fois chaque année que vous cesseriez d’être nommé le jour où la guerre serait finie ? » M. Kevorkian finit par répondre : « Oui, je me rappelle parfaitement, mais depuis ces trois ans, des Turcs sont venus à plusieurs reprises pour proposer leurs services : pourquoi ne les avez-vous pas acceptés ? j’étais donc en droit de penser qu’on continuerait de me nommer. »
M. Kevorkian estime qu’en le proposant au ministre comme répétiteur pendant la période du 1er janvier au 31 octobre 1923, l’Administrateur a pris un engagement -à savoir de le faire effectivement nommer. L’Administrateur explique à M. Kevorkian qu’un tel engagement n’a pas été et ne pouvait pas être pris par lui.
M. Kevorkian, interrogé sur la question de savoir s’il accepte d’être indemnisé pour la fin de l’année 1921-1922, dans les conditions qui lui ont été proposées, refuse de répondre. L’Administrateur lui rappelle que les trois points qui font l’objet de l’entretien auquel il a été convoqué, en insistant sur ce fait que ces trois points sont absolument distincts et qu’il n’y a pas lieu de les mélanger. En réponse à une question formelle posée par M. Delabrousse : « Acceptez-vous les propositions que vous renouvelle une dernière fois M. l’Administrateur de l’École et qui se résument ainsi :
1°) L’Administrateur remettra à M. Kevorkian, à titre d’indemnité de départ, une somme de 3.000 francs (une formule de reçu, dont le texte est donné ci-dessous (1), a été préparée à cet effet par M. Delabrousse) ;
2°) L’Administrateur proposera M. Kevorkian à M. le Ministre de l’Instruction publique pour remplir à nouveau les fonctions de répétiteur de turc à l’École des Langues orientales du 1er janvier au 31 octobre 1923 ;
3°) En ce qui concerne l’année scolaire 1923-1924 et les années suivantes, M. Kevorkian ne sera plus l’objet d’aucune proposition pour le poste de répétiteur de turc à l’École des Langues orientales vivantes. »
M. Kevorkian a déclaré refuser ces propositions.
L’entretien a pris fin sur ce refus à midi.
Formule de reçu préparée par M. Delabrousse :
Reçu de Monsieur Boyer, Administrateur de l’École des Langues orientales, la somme de trois mille francs à titre d’indemnité à forfait pour services rendus à l’École en 1922. »
Par la suite, j’ai appris que non seulement je n’avais pas touché mes appointements pour l’année scolaire 1921-1922, mais vous ne m’avez jamais parlé des sommes complémentaires auxquelles j’aurais pu prétendre : supplément temporaire de traitement : 1165 frs ; indemnité de résidence : 1200 frs ; indemnité de vie : 454,92 frs. »
Le 5 janvier 1923, vous me conviez à un nouvel entretien au terme duquel j’acceptai de donner la totalité des répétitions que comportait l’année scolaire entière 1922-1923. J’ai repris mes fonctions le 8 janvier.
En novembre 1923, vous proposiez au ministre de l’Instruction publique de renouveler en ma faveur, pour l’année scolaire 1923-1924, l’arrêté par lequel j’avais été chargé, durant l’année scolaire écoulée, des fonctions de répétiteur de langue turque à l’École des Langues orientales. L’indemnité que vous proposiez de m’allouer, qui courait du 1er novembre 1923, était de six-mille francs (augmentée du supplément prévu par décret).